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Stage parrainage : “Ça a tout de suite matché”

L’un et l’autre habitent à moins de 15 km mais ne se connaissaient pas. Après un an de travail et transmission au quotidien, Guy Lavigne a cédé son exploitation à Benjamin Lescure.

Lorraine, une paisible salers, docile comme ses consœurs, apprécie la compagnie de celui qui l’a élevée et de celui qui lui a succédé.
Lorraine, une paisible salers, docile comme ses consœurs, apprécie la compagnie de celui qui l’a élevée et de celui qui lui a succédé.
© PO

Il y a quelques semaines Guy Lavigne a fait valoir ses droits à la retraite, quasiment 40 ans jour pour jour après s’être installé sur l’exploitation familiale de Bournazel à Saint-Cernin. “Je me suis toujours dit que je réussirais ma vie professionnelle si un jeune me succédait. J’aurais mal vécu que ma ferme parte à l’agrandissement ou à des Aveyronnais...”, sourit l’ancien producteur de lait, associé à son épouse Dominique, et dont la carrière s’est conjuguée à de nombreuses responsabilités professionnelles. Forcément, lui aurait préféré transmettre le flambeau à son fils, comme son père avant lui. Les trajectoires de la vie en ont décidé autrement et c’est vers leur salarié que Guy et Dominique Lavigne tournaient leurs espoirs. “De par mes fonctions para-agricoles, j’ai toujours eu besoin d’un peu de salariat et je me suis toujours mis dans la tête que le salarié avec lequel j’ai travaillé pendant huit ans reprendrait l’exploitation”, relate le président de la fédération Cantal de Groupama d’Oc. Là encore ce ne sera pas le cas.

Les clés vers l’autonomie

À un an de sa prise de retraite potentielle, le propriétaire-exploitant se met donc en quête d’un repreneur. Par l’entremise du RDI (Répertoire départemental à l’installation, lire p. 4) et de connaissances communes, sa route croise celle de Benjamin Lescure, 26 ans. Guy Lavigne se souvient très bien de cette première rencontre en mai 2019. D’emblée, le courant passe, les deux hommes partagent un même état d’esprit. “Ce qui m’a plus, c’est sa franchise”, affiche Benjamin. “Ça a matché”, résume le cédant, à un bémol, de taille : la production. Fils d’éleveur salers à Jussac, Benjamin n’a pas franchement la fibre laitière. “Ça ne s’improvise pas”, estime le jeune homme, inscrit au RDI dès son BTS(1) en poche en 2014. Un obstacle pas insurmontable puisque, dans la perspective de l’installation de son salarié, Guy Lavigne a conforté son atelier salers en parallèle d’une diminution du cheptel laitier, depuis deux-trois ans. Reste cependant à confirmer cette bonne première impression et les intentions de chacun : conseillés par Gérard Vigier (RDI), les deux hommes conviennent d’un stage de parrainage(2).

Pendant un an, sur l’année 2020, Benjamin va partager le quotidien de Guy sur l’exploitation. “Quand je suis arrivé, Guy m’a dit que j’avais du bol, parce qu’il allait être présent 15 jours d’affilée avant d’être pris par ses responsabilités”, s’amuse Benjamin qui a très vite pu prendre de l’autonomie, appréciant la philosophie de son “parrain” : “Il part du principe qu’après m’avoir montré une fois, c’est à moi de me débrouiller”, explique le jeune agriculteur. “Je considère que les gens peuvent faire des erreurs, qu’on ne peut pas réussir du premier coup et que c’est justement de ses erreurs qu’on apprend”, abonde Guy Lavigne qui a été séduit par la bienveillance de son successeur - “un gars gentil au sens noble du terme” - tout autant qu’impressionné par son perfectionnisme.

Priorité pour le cédant : que Benjamin se familiarise avec le cheptel allaitant tout en officiant en appoint à la traite et en formalisant son projet et parcours d’installation. Au terme d’un premier semestre de partage concluant, à partir du 15 août, “on a pris le taureau par les cornes”, image le jeune retraité qui continue de donner des coups de main à son successeur. Le troupeau laitier a quitté Bournazel, la stabulation des laitières a été transformée en bâtiment de 42 places pour les salers avec des parcs à veaux.

Passage de témoin serein et ajusté

Au 1er janvier 2021 tout était prêt pour que Benjamin Lescure débute sa carrière d’exploitant en rachetant le troupeau allaitant (40 vaches et 20 génisses), le matériel, et en louant les 76 ha de l’exploitation et les bâtiments. Son projet ? “C’est un système broutards classique avec à terme 70 vaches. Mon objectif de départ c’est de mettre un taureau charolais sur toutes les vaches pour valoriser au mieux les broutards, expose le jeune chef d’entreprise. Et de faire à terme mon propre renouvellement. Je veux axer mon système sur l’herbe, sachant que si je veux gagner ma vie, il me faut réduire les coûts”, avance l’éleveur bien conscient d’une conjoncture des moins favorables. Il préfère rester positif et veut croire que le vent tournera en prenant modèle sur la trajectoire de son père, “installé à Jussac en partant de rien”. Pour l’heure, il savoure d’avoir pu concrétiser son rêve, sans avoir à renoncer à une autre de ses passions - l’Ovalie - et au club de Saint-Cernin où il évolue depuis bientôt deux décennies. “Je reste dans l’idée d’essayer de continuer le rugby même si le travail sur l’exploitation va forcément compliquer la tâche”, confie ce deuxième ligne reconverti en pilier, habitué à l’âpreté de la mêlée et à l’adversité du combat. Quant à son aîné, Guy Lavigne, s’il ne masque pas son inquiétude quant “à la tournure que prend l’agriculture, soumise à l’agribashing, aux aléas, crises...”, il se dit serein quant à l’état d’esprit de son désormais fermier et la relation construite avec Benjamin. Et soulagé de ne pas voir partir ses salers...

(1) Après un bac STAV au lycée agricole d’Aurillac, puis un BTS en production agricole à Brioude-Bonnefont, Benjamin Lescure a été salarié pendant sept ans dans le secteur des travaux publics ainsi que dans le négoce de bétail.

(2) Au cour duquel, Benjamin a continué à percevoir ses indemnités Pôle emploi.

 

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