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Le petit Poucet fromager a trouvé le chemin des grandes tables et de l'export

La tomme au lait de salers Le Salerac et son cousin le Séverac imaginés par Pierre Lantuéjoul et fabriqués par des producteurs fermiers séduisent particuliers et professionnels.

Pierre Lantuéjoul, fondateur de la maison Séverac en hommage à sa grand-mère et arrière grand-mère, avec une pièce de Salerac.
Pierre Lantuéjoul, fondateur de la maison Séverac en hommage à sa grand-mère et arrière grand-mère, avec une pièce de Salerac.
© P. O.

Pierre Lantuéjoul ne croit pas aux hasards de la vie. "Nous sommes sur Terre pour boucler des boucles", confie le chef d'entreprise. La sienne, de boucle, prend la courbure d'un petit fromage de 700 g à la croûte joliment boutonnée. Si, comme beaucoup de Cantalous, Pierre Lantuéjoul avait une arrière-grand mère, Marie Séverac, qui transformait le lait de son petit troupeau de vaches en fromage à Mandailles dont la famille est originaire, ses aïeux étaient aussi crémiers-fromagers à Paris. Celui dont le rêve était de s'installer agriculteur a renoué avec cet univers il y a une dizaine d'années au terme d'une carrière de responsable commercial pour un groupe semencier dans le Grand-Ouest, puis pour les établissements Boulet (alimentation animale) en Lozère avant de se lancer dans l'export au sein d'une société parisienne qu'il va racheter et qu'il dirige toujours.

Délesté pour mieux voyager
"Cette activité m'a permis de parcourir le monde, l'Afrique, l'Asie... et de m'apercevoir qu'on trouvait rarement du cantal proposé à l'export", relate le fondateur de la maison Marie Séverac, en clin d'oeil à ses ancêtres de la vallée de la Jordanne. Et pour cause, les fourmes de cantal sont bien lourdes pour être expédiées entières, et une fois coupé, le fromage voyage mal, transpire sous vide...
Au gré d'échanges avec un autre chef d'entreprise cantalien, Sébastien Pissavy, génial inventeur de l'Odysée interactive mais aussi d'un site de e-commerce de produits du Cantal et d'Auvergne, testadaz.com(1), Pierre Lantuéjoul a le déclic : faire "maigrir" le fromage. Pourquoi ne pas tenter un format plus petit et donc plus facilement transportable ? De premiers essais à l'échelle d'un demi Cantalet sont réalisés avec un moule pour 5 kg et le lait des salers de Jean-Pierre Chauvet, producteur raulhacois engagé dans la démarche Tradition salers. "Les résultats étaient plutôt bons, alors on a poussé le bouchon plus loin", raconte le patron de la maison Séverac. Plus loin jusqu'à un moule pour des tomes d'un kilo. Le Salerac était né.
Fort de retours positifs dans le giron familial et d'amis sur ce nouveau-né, Pierre Lantuéjoul se met en quête de producteurs prêts à s'engager dans cette production singulière. Sa route va croiser celle de la coopérative de Saint-Bonnet-de-Salers dont une partie du lait des producteurs va être transformé en Salerac (reconnaissable à sa tête de salers incrustée dans la croûte) et Séverac, son cousin non issu de lait de salers. La maison Séverac met à disposition de la coopérative les moules et presses conçus et adaptés pour ces petits formats. Cette collaboration va s'interrompre en 2020, la coopérative faisant savoir qu'elle ne souhaite plus travailler de lait cru. "Les consommateurs n'ont plus la mémoire gustative et olfactive du "vrai cantal", celui qu'on fabriquait jadis au lait de salers", regrette l'entrepreneur, qui sait que sa démarche n'a pas toujours été comprise.

Affinage dans l'ex-laiterie Chautard
Fin de l'aventure ? Nouveau départ plutôt. Deux producteurs fermiers, Guillaume Rongier et Jean-Pierre Chauvel, manifestent leur intérêt pour perpétuer ce fromage auquel tous deux croient. Voilà la production relancée, affinée pour l'heure à Perpezat, dans le Puy-de-Dôme. Plus pour longtemps : Pierre Lantuéjoul a en effet acquis l'une des anciennes laiteries de Thiézac(2), la laiterie Chautard, au coeur du bourg, en passe d'être reconvertie en caves d'affinage (lire ci-dessous). Ces dernières auraient dû être étrennées le 27 septembre, la pénurie de matériaux en a décidé autrement.
"Il nous manque une seule pièce, depuis deux mois on fait la France entière pour la trouver, et elle devrait bientôt arriver", indique M. Lantuéjoul. Son nouveau challenge : rallier une dizaine, voire une quinzaine de producteurs pour asseoir et développer cette filière : "La demande existe, le produit plaît, l'outil est en passe d'être finalisé..."


Appel aux producteurs
Ne manque plus que des producteurs auprès desquels la maison Séverac met en avant une série d'atouts, à commencer par une production fermière compatible avec une vie sociale. "Il n'y a qu'une seule fabrication par jour, on a mis au point des moules ergonomiques, des poignées sur les presses-tome plus faciles à manipuler pour des femmes, on collecte les fromages chaque semaine avec une valorisation entre 900 et 1 000 EUR/t en lait de salers...", liste Pierre Lantuéjoul. Autre argument : cette production peut parfaitement venir en complément (en début ou fin de saison par exemple) d'une transformation en cantal, salers... sans avoir besoin d'un litrage important ni de matériel spécifique(3) outre les moules. Et Pierre Lantuéjoul de se laisser aller à imaginer une filière associant les terroirs de la vallée de la Cère et de la Jordanne.

(1) Fermé en 2009.
(2) Où son grand-père a longtemps été secrétaire de mairie.
(3) Un dispositif permet ainsi d'intégrer quatre moules de Séverac dans un presse-tome classique.

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