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Des repas-concerts dans la cour de ferme et au milieu des estives

Éleveur aubrac à Cézens, Thomas Gras a décidé de concrétiser un projet de restauration original à la ferme via des soirées conviviales et des repas au coeur des estives.

Thomas Gras et son épouse dans le food-truck de la Ferme du Graillou.
Thomas Gras et son épouse dans le food-truck de la Ferme du Graillou.
© P.O.

En agriculture comme au tennis, il y a des rebonds inattendus qui marquent des trajectoires et des carrières. À l'évidence Thomas Gras vient d'en engager un, ajoutant ainsi un service qu'il espère gagnant à son jeu déjà reconnu d'éleveur d'aubrac. Il y a dix ans, le nom de ce nouveau venu sur le circuit cantalien était encore méconnu. Titulaire d'un BP animalerie et d'un BPREA, le Neuvéglisien fait d'abord ses gammes auprès de ses futurs pairs, endossant le maillot de sparring partner comme salarié agricole. Inscrit au RDI, il décroche son ticket pour débuter
véritablement sa carrière en solo en s'installant en 2012 sur une exploitation qui se libère sur Cézens, à Arjaloux. Il reprend en fermage l'intégralité des terres et du cheptel, inscrit à l'OS aubrac et composé de 50 mères et du renouvellement. Une configuration idéale avec 80 ha de prairies naturelles divisés en deux seuls îlots.

Adoubé de la famille aubrac
Priorité du jeune agriculteur : affermir son jeu pour prendre l'avantage en misant sur l'amélioration génétique du troupeau. "Je souhaitais me rapprocher au maximum des standards de la race, tout en mettant l'accent sur la docilité", expose-t-il. Son travail de sélection, en recourant à des taureaux de station et de fermes réputées, s'avère rapidement payant. Dès l'année suivante, il s'aligne sur son premier tournoi, le Départemental aubrac
d'Anterrieux, avec Bourgeoise, qui, sans passer le premier tour, finira tout de même cinquième de sa section. Ce premier encouragement le motive à retenter sa chance l'année suivante à Saint-Flour, cette fois en concourant pour le prestigieux prix d'ensemble (six animaux alignés) qu'il remporte. Un premier mini-sacre pour le jeune éleveur hors-cadre familial qui salue  l'accueil et le soutien reçus dès son installation tant de la part de ses voisins que de la grande famille aubrac. Depuis, Thomas Gras participe chaque année au Départemental, à Cournon, et a même foulé le ring du National aubrac. Pas de Grand Chelem mais un bon classement dans la hiérarchie aubrac.
Son élevage affiche cependant une vraie faiblesse structurelle : l'autonomie fourragère. En 2017, nouvelle opportunité et montée au filet : une exploitation de 30 ha (et 40 ha de montagne) avec bâtiments attenants sur Cézens, en location avec une maison d'habitation. Tout ce que le couple recherche. "Ça nous a bien soulagé en termes d'autonomie et nous a permis de monter à 70 vêlages, on a aussi mis un peu de charolais - à hauteur de 20 % - pour mieux valoriser les femelles", expose l'agriculteur, qui vend une dizaine de velles au sevrage destinées à alimenter la filière Fleur d'Aubrac ainsi que quelques réformes pour le label rouge BFA.

Service payant
Mais la répétition des sécheresses et des pullulations de campagnols obscurcit l'horizon comme les objectifs de performance. Cette succession d'aléas va cependant motiver Thomas Gras, épaulé par son épouse Élodie, à varier la gamme de son jeu en faisant d'un revers un coup offensif. "On avait toujours eu en tête un projet de restauration à la ferme, on avait pensé à une ferme auberge sans jamais trouver le lieu idéal, sachant qu'on souhaitait rester sur Cézens", relate Élodie.
L'hiver dernier, germe alors une alternative originale : capitaliser sur la proximité de Prat-de-Bouc et de la vallée touristique de Brezons pour organiser des repas-concerts estivaux à la ferme, dans l'esprit guinguette. Trois dates sont retenues pour cette première année : les 17 juin, 15 juillet et 11 août avec un groupe musical différent pour chaque soirée. Au menu de la ferme rebaptisée du Graillou : que des produits issus de la ferme et cuisinés maison : farçous, charcuterie pièce ou brochettes de boeuf, truffade, fromage (local) et tartes.
"On vise autant les touristes que les locaux, sachant qu'on n'a aucune référence en termes de fréquentation, le concept est un peu inédit ici", précise l'agriculteur, accompagné par les services de la Chambre d'agriculture. Pour ce faire, Thomas Gras a mis les bouchées doubles : deux génisses et un porc ont été abattus en début d'année à Neussargues puis transformés par l'atelier du lycée de Volzac selon des recettes mises au point par le couple afin de proposer plats cuisinés, viande sous vide, pâtés, salaisons... Des produits fermiers proposés depuis quelques semaines dans le petit chalet en bois aménagé en point de vente dans la cour de ferme à la sortie du bourg de Cézens.

Transhumance : une nécessité avant d'être une tradition
L'agriculteur, qui s'est formé à l'hygiène alimentaire et a obtenu sa grande licence restauration (pour servir de l'alcool lors des repas), se dote en outre d'une remorque food-truck, d'un brasero XXL et de tout le nécessaire pour cuisiner et servir des repas(1),... y compris au milieu des estives ! "L'idée c'est aussi de faire découvrir les temps forts qui rythment l'élevage : la transhumance et la descente des animaux", explique Thomas. Lundi dernier, ce sont ainsi une quarantaine de personnes qui, pour la première fois, ont accompagné une trentaine d'aubrac sur leur lieu de villégiature estivale à plus de 1 400 m d'altitude. Un site uniquement accessible à pieds : "Pour nous, la transhumance ce n'est pas du folklore mais une nécessité", glisse Thomas qui a acheminé en 4x4 les tables, chaises et le repas concocté par le couple.
"Le cadre et le temps étaient magnifiques, les gens étaient ravis de manger au milieu des montagnes, des vaches et des mouflons sous le Plomb du Cantal !", s'enthousiasme l'éleveur, qui s'était fait la main 15 jours auparavant pour la fête de la Transhumance à Cézens. Trois cents repas servis en deux jours pour leur baptême du feu ! "Ça fait plaisir de voir des gens qui s'intéressent encore à l'agriculture, qui nous posent plein de questions, qui ont envie de déguster notre viande et c'est important pour nous de donner une image positive de l'agriculture en s'inscrivant dans le circuit le plus court possible", affiche le jeune éleveur, qui a décidé de faire appel à un agent de remplacement pour les gros travaux afin de s'impliquer sur la partie restauration. Thomas Gras ne cache pas être dopé par l'énergie insufflée par cette diversification au contact du public, tout en gardant les pieds bien ancrés sur terre.

(1) Investissement total (chalet, food-truck...) : 33 000 EUR.

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