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Besnoitiose : une maladie émergente mais... galopante

Méconnue à l'aube des années 2010 dans le Cantal, cette maladie parasitaire fait une progression sournoise au sein des cheptels. Le GDS invite les éleveurs au dépistage.

À gauche, la vache contaminée à l'ehrlichiose qui devra prochainement être abattue.
À gauche, la vache contaminée à l'ehrlichiose qui devra prochainement être abattue.
© P.O.

Pas besoin d'un oeil expert pour confirmer que la vache 5471 dénote au milieu du lot de salers qui pâture aux abords de l'exploitation du Gaec de la Vache rouge à Vézac. Une maigreur incontestable par rapport à ses congénères destinées à la boucherie. "S'il n'y avait pas le veau, on s'en serait déjà débarrassé", tranche Jean Bouniol. Ce sera le cas dès que le veau sera sevré, confirme son jeune associé Guillaume Basset. Pas question en effet pour les deux éleveurs de prendre le risque d'une diffusion dans le troupeau de la besnoitiose qui y a fait une première - mais heureusement timide - apparition ce début d'année.
Débuts asymptomatiques
Avant de mélanger leurs deux troupeaux acajous et de vendre une trentaine de bêtes, les deux futurs associés ont en effet eu la judicieuse idée de faire réaliser  un dépistage (sérologique) sur l'ensemble des animaux de plus de deux ans, soit pas loin de 150 vaches dépistées en février. Sans trop d'appréhension quant aux résultats : "Nos deux troupeaux étaient clean, indemnes IBR et BVD...", relève Guillaume Basset, jusqu'à peu installé en individuel sur l'exploitation de son grand-père au Couderc de Yolet. Au retour des analyses, c'est la douche froide : pas loin de dix échantillons reviennent "douteux ou proches du seuil de positivité", le verdict final confirmera deux cas positifs. "Deux vaches qu'on n'a jamais vues malades mais c'est vrai que cela faisait bien quelques mois qu'elles étaient plus maigres", constate Jean Bouniol, plus serein aujourd'hui face à une maladie émergente qui, à ses yeux, doit être endiguée au plus vite avant qu'elle ne se dissémine au sein du troupeau cantalien. "Notre ferme étant très morcelée, il faut prendre un parapluie encore un plus grand", image-t-il.

Contaminants... à vie
Un avis pleinement partagé par Florence Poret, vétérinaire au GDS du Cantal, qui a accompagné le Gaec de la Vache rouge au travers d'un plan d'assainissement. Son message : agir vite et surtout ne pas minimiser les risques inhérents à cette maladie parasitaire qui peut faire des ravages sévères et rapides au sein d'un élevage. "La maladie gagne énormément : on peut passer en un été de 5 % de prévalence au sein du troupeau à 40 %. Ici ce n'est pas le cas, on est probablement sur une contamination de voisinage", estime la vétérinaire. "Un taon qui a passé la clôture", glisse Jean Bouniol, dont les parcelles se situent sur plusieurs communes : Vézac, Yolet, Arpajon, Lacapelle-Barrez, Vic mais aussi sur une estive à Marcenat. Une chose est sûre pour Florence Poret : compter sur une immunité collective du cheptel cantalien une fois une majorité d'élevages touchés est tout sauf une bonne idée. En premier lieu parce que ce serait accepter de la casse : si certains animaux sont asymptomatiques, une autre partie va déclencher des affections conduisant à la mort au terme de la phase dite de sclérodermie responsable du surnom de la besnoitiose : la maladie de la peau d'éléphant.
"Ça peut être plus ou moins chronique, toutes les vaches ne vont pas être atteintes autant, ce qui amène d'ailleurs l'éleveur à garder un animal mais c'est là encore une erreur car le parasite reste lui présent toute la vie dans la peau de l'animal de fait contaminant", alerte la spécialiste. Au-delà d'un amaigrissement, d'une perte de production, la besnoitiose est aussi souvent responsable de la stérilité des mâles reproducteurs. Une vraie bombe à retardement d'autant qu'on la sait présente chez certains sélectionneurs qui continuent d'exporter leur génétique.

Seule issue : isoler et éliminer
Quant à miser sur un traitement, c'est une stratégie tout aussi dérisoire : la première phase de la maladie (d'hyperthermie) est en effet peu spécifique avec des symptômes - quand ils se manifestent - qui peuvent évoquer une ehrlichiose, une grippe (lire ci-dessous). "Le traitement s'avère très coûteux et de toute façon, il n'est plus efficace au-delà de sept à dix jours après les premiers symptômes", commente la vétérinaire, qui fait aussi valoir le fait que le département est frontalier de l'Occitanie très touchée par la besnoitiose et que les zones
d'élevage plus au nord, encore indemnes, s'organisent pour le rester. Sans compter une pratique d'estive très répandue dans le département(1).
Maladie émergente
Dans le Cantal où la maladie était inconnue il y a une décennie seulement, grâce au dépistage de tous les laits réalisés chaque semestre, on connaît sa prévalence dans les élevages bovins lait : un peu moins de 2 %. Sans doute davantage chez les allaitants du fait des modes de conduite. En Ariège, où la besnoitiose a été décrite la première fois il y a 150 ans, ce ratio atteint aujourd'hui 30 %. "On ne peut pas ne rien faire, il y a une vraie nécessité d'alerter les gens", insiste la vétérinaire du GDS dont les premiers plans d'assainissement remontent à 2016.
Ces plans d'assainissement  consistent en priorité et urgence à rentrer et isoler le ou les animaux positifs pour éviter une contamination du reste du troupeau "avant de voir avec l'éleveur à quel moment il convient de le/les dégager".
Au Gaec de la Vache rouge, Jean Bouniol et Guillaume Basset se félicitent d'avoir dépisté et réagi dans les plus brefs délais. Ils ont aussi pris soin d'informer leurs voisins, les analyses réalisées par ces derniers s'étant à leur soulagement avérées négatives. Une précaution et vigilance qui, pour Florence Poret, doivent servir d'exemples.

(1) Une partie des estives collectives demandent dans leur règlement une sérologie négative avant la montée.

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